Jacques Vapillon ®
Selon un vocable local, il insiste être de « Brest même » et une précision fuse : s'il a étudié dans un lycée appelé Saint-Pierre, c'est en référence au quartier de la rive droite où il a grandi, et en aucun cas à une institution religieuse car il n'a jamais mangé de ce pain là, fût-il béni. Mais avec un patronyme qui ne commence pas par « ker » ou ne se termine pas en « ec », le vice-président de la fédération française de voile impose un cours d'histoire-géographie. Il est en Emilie-Romagne un village haut perché qui s'appelle Palagano, moins connu que celui d'en-bas, Maranello, où vrombissent les Ferrari. Les Bacchini, à l'origine, viennent de là-bas, mais le grand-père d'Henry était un Italo-Américain débarqué à Brest en 1917 avec les Marines. Il n'en est pas reparti. « Et comme je suis grand-père moi-même, nous en sommes à la cinquième génération des Bacchini brestois », relève Henry, 62 ans, désormais retraité de l'école d'ingénieurs (ENSIETA) où il a enseigné l'éducation physique pendant 32 ans, mais toujours actif dans le sport.
Voilà un an, il ramenait encore des médailles des J.O. de Pékin. A Qing Dao, il était l'élu responsable de la FFV, comme à Athènes, quatre ans plus tôt, et à Barcelone en 1992. Henry Bacchini s'était trouvé écarté des campagnes olympiques de 1996 et 2000, celles qui n'ont pas réussi à la voile française, mais il était déjà le militant derrière le triomphe du fameux duo Le Déroff-Hénard, de la SR Brest, couvert d'or à Séoul en 1988. « C'est la victoire qui a crédibilisé le discours, rappelle-t-il. La victoire d'un fils de prof et d'un fils de douanier. » Avant Bacchini, la voile était un sport d'élite. Il en a fait un mouvement populaire. Il a créé des infrastructures, à Brest, avec le soutien des maires socialistes, Francis Le Blé et Pierre Maille. Il a fondé le comité du Finistère, avec Jean Kerouas, en 1981. Il a unifié la voile bretonne, qu'il a fait passer, entre 1989 et 2001, de 20.000 à 74.000 licenciés. Depuis 2001, il est vice-président de la fédération française, dont il avait tenté de prendre la présidence en 1993. « Quelle rouste j'avais ramassée ! », en rit-il encore, accusé par ses détracteurs de l'époque d'être communiste. C'était un peu exagéré...
Cela reste la seule défaite électorale de toute la carrière de dirigeant d'Henry Bacchini, élu depuis l'âge de... 16 ans. A l'AS Brestoise, club omnisports, il représentait au bureau les jeunes de toutes les sections. Lui-même pratiquait l'athlétisme. Et il s'est mis au rugby, en alternance avec la voile, trois-quart centre de septembre à mars, régatier de mars à septembre. Et homme de défi, toujours ! Il a monté des projets pour battre les Anglais dans l'Admiral's Cup rebaptisée Champagne Mumm en 1977 et remporter la même année le Fastnet. « On gagnait avec des petits budgets », bave-t-il encore de satisfaction, comme si, dans sa vie, rien ne l'a plus réjoui que de s'attaquer aux riches.
« Quand je me suis marié, 30% du budget familial a été consacré à l'achat d'un bateau », rappelle-t-il pour justifier sa vraie passion. Infatigable militant, il s'est retenu de se lancer en politique pour ne pas mettre en péril les projets voile. Qu'importe, son épouse a pris la place. Depuis 2002, Madame est député de la 2e circonscription du Finistère et membre de la commission de la Défense à l'assemblée nationale.