Jacques Vapillon ®
Avis de grand coup de « pétole » ! Cette fois les fichiers méditerranéens sont formels. Tous s'accordent pour dire que la panne de vent sera inévitable à mi-chemin des 100 milles qui séparent la plus sauvage des îles des Baléares de Barcelone. Aucun des équipages ne pourra échapper à ce « grand mur de pétole » selon Jean-Luc Nélias. Le navigateur de Veolia Environnement qui fait tourner les cartes et les modèles, a trouvé la bonne image pour expliquer la situation à laquelle tous seront bientôt confrontés. Pire que la tempête, la « calmasse » n'a en effet pas son pareil pour lever un grand vent d'incertitude. De quoi mettre les nerfs des bords, toujours tendus dans la quête de la performance et du moindre dixième de nœud, à très rude épreuve.
Vite de la vitesse !
Quand la menace de la « pétole » gronde et se rapproche des étraves, le bon sens marin indique alors de ne surtout rien céder, de tailler la route vaille que vaille le plus vite et le plus loin possible. Dans ce contexte, les équipages de fins régatiers n'ont donc pas manqué, depuis le départ de Nice, de tirer profit d'un flux de nord, nord-est propice à la glisse. À ce petit jeu de la course de vitesse dans du petit temps, les hommes de Kito de Pavant ne déméritent évidemment pas et ont toutes les raisons de garder le sourire : la Vache est créditée d'une dizaine de milles d'avance sur 1876, d'une vingtaine sur Foncia, d'un bonus de 26 milles sur Veolia Environnement (Roland Jourdain) et sur Paprec-Virbac 2 (Jean-Pierre Dick), et de 48 milles sur DCNS (Marc Thiercelin). Le speedo de Groupe Bel affiche surtout un nœud de plus que ceux de ses plus proches concurrents.
La hiérarchie établie cet après-midi semble donc bien fragile au regard du sombre tableau météo annoncé. Dans quelques heures, quand le vent commencera à jouer les filles de l'air et avec les nerfs, la flotte se regroupera. Chacun des équipages pourra alors miser sur sa bonne étoile pour tirer son sillage du jeu, notamment les retardataires qui voient déjà là une belle occasion de se refaire une petite santé. La nuit s'annonce longue sur les eaux troubles de la Méditerranée. Elle sera celle de tous les dangers : pour les premiers comme pour les derniers...
Ils ont dit
Sébastien Audigane - Groupe Bel
« Cette nuit, nous avons eu une navigation très agréable, nous avons bien glissé sur la route même s'il nous a fallu faire quelques empannages pour suivre les bascules. À bord, nous sommes très motivés pour effacer le souvenir de la première étape que nous avons menée pour au final terminer 3es. Le bateau navigue très vite : on l'a bien vu hier quand nous avons passé Foncia sous le vent. Dans les classements aussi, on peut lire que Groupe Bel va souvent un nœud plus vite. Le bateau va bien !Après Minorque, nous allons devoir traverser une zone sans vent qui se déplace sur un axe nord-sud : il nous faudra rester vigilants, nous n'allons pas beaucoup dormir avec beaucoup de manœuvres en perspective. »
Christopher Pratt - DCNS :
« Tout va bien à bord de DCNS. Nous avons eu une nuit calme en termes de manœuvres : au portant sous spi, nous avons juste eu quelques petits empannages à faire. Dans ces conditions de petit temps qui ne nous sont pas très favorables, on essaye de faire avancer au mieux le bateau. Si c'est un peu frustrant de progresser moins vite que les autres, ces conditions restent pour nous très instructives : nous apprenons beaucoup sur le bateau et les réglages. Une grosse bulle nous attend avant l'atterrissage à Barcelone : elle nous permettra peut-être de revenir dans la bagarre. Cette nuit, nous avons donc fonctionné avec des rotations de deux personnes sur le pont. Nous avons tous bien récupéré et nous sommes en pleine forme pour la nuit agitée qui nous attend avant l'arrivée ! »
Jean-Luc Nélias - Veolia Environnement :
« Cette nuit, nous avons eu des conditions assez faciles, nous avons disputé une course de vitesse, une petite bataille d'empannages avec des gains et des pertes. À bord de Veolia Environnement, nous souffrons toujours d'un petit déficit par rapport aux autres bateaux qui sont peut-être un peu plus à l'aise. En approche de Minorque que l'on devrait doubler en milieu d'après-midi, le vent bouge, oscille beaucoup en intensité et direction. On devra aussi négocier des petits effets de côtes, mais c'est ensuite, à mi-chemin entre l'ouest de Minorque et Barcelone, que les conditions météo se compliquent beaucoup. Nous allons tomber sur un mur
complet de pétole qui va complètement redistribuer les cartes. »
Michel Desjoyeaux - Foncia :
« On aperçoit Minorque à travers quelques petits nuages. Ça va pas mal ce matin, même si on vient de se faire un peu décrocher par Groupe Bel. Nous sommes au contact avec 1876. Nous naviguons dans des vents de nord, nord-est de 13-14 nœuds assez variables. A Minorque, je ne sais pas si nous n'avons pas intérêt à nous arrêter acheter des pagaies ou à patienter en allant faire un petit tour dans les boîtes de nuit locales ! Ensuite, après les Baléares, le scénario se complique en effet fortement : à en perdre son latin ! Cela ne sert presque à rien qu'on s'énerve maintenant, parce que dans l'ouest de Minorque on aura comme un nouveau départ pour rejoindre Barcelone. »
Jean-Pierre Dick - Paprec-Virbac 2 :
« Nous sommes dans 12-13 nœuds, et l'on aperçoit la côte de Minorque dans un ciel bien bleu avec des petits cumulus qui commencent à bourgeonner. Nous avons encore des vents assez soutenus. Ensuite, ce ne sera plus la même histoire. Environ à mi-chemin entre Minorque et Barcelone, le gradient va diminuer et le vent complètement s'écrouler. Nous allons progresser vers l'arrivée au ralenti et le final sera, dans ces conditions, sous très haute tension. »
Il y a 958 jours
Mer 9 Sept : Tir groupé vers les Baléares
En rangs serrés ! Après avoir laissé, hier midi, Nice et la baie des Anges dans ses sillages, la flotte de l'Itstanbul Europa Race a renoué avec ses vieux démons sur la deuxième étape en direction de Barcelone : ceux de la régate au contact dans les eaux incertaines de la Méditerranée ! Pour ne pas changer avec les bonnes habitudes, un duel au sommet, qui oppose, ce matin Foncia et Groupe Bel distants d'un demi mille, donne le tempo et imprime un rythme soutenu. Au classement de 6 heures (HF), seuls 20 milles séparent, sur la route des Baléares, les équipages de Michel Desjoyeaux, en tête, et Marc Thiercelin (DCNS), qui ferme la marche mais ne baisse certainement pas la garde…
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