Groupe Bel ®
Nouveau décor, nouvelles cartes mais même rythme à bord des monocoques Imoca de l'Istanbul Europa Race. Dans cette troisième et dernière étape disputée entre Barcelone et Brest, la navigation se poursuit au près dans des vents avoisinant les 15-20 nœuds. Comme pour garder d'elle un souvenir indélébile, la mer Méditerranée a permis aux équipages de la laisser derrière eux en passant le détroit de Gibraltar sur un seul bord et de jour pour les premiers.
D'une mer à l'autre, d'un monde à l'autre, point de trou noir, mais une continuité dans la complexité. Ainsi, alors que le Cap Saint-Vincent se présente actuellement devant l'étrave du leader de la flotte, Michel Desjoyeaux, la situation météo pousse les stratèges du bord à œuvrer à plein régime. Si chacun semble avoir fait le deuil d'une navigation ponctuée par les glissades sous spi, il leur faut maintenant composer avec une remontée le long des côtes portugaises au près. A ce jeu là, tous vont s'efforcer de négocier au mieux les bascules et continuer à creuser devant et à réduire l'écart derrière.
Foncia comme dans les livres
Bien installés en tête, les hommes de Foncia poursuivent inlassablement leur cavalier seul Atlantique, imposant un rythme soutenu et suivant à la lettre le routage idéal. Avec une fluidité assumée et remarquable, Mich' et ses équipiers entendent bien prendre l'avantage, aussi bien sur le plan sportif que psychologique. Mais chez les poursuivants, personne ne baisse les bras à commencer par le dauphin du Professeur, Veolia Environnement. Pénalisé par l'âge de leur monture sur les deux premières étapes dominées par les petits airs, les équipiers de Roland Jourdain sont à la fête depuis plusieurs jours et leur grande forme fait plaisir à voir et à entendre. Au près, dans la brise, le monocoque de Bilou prouve qu'il n'a rien perdu de sa superbe. Mais ni Groupe Bel, ni Paprec Virbac 2 ne consentiront à laisser la robe rouge et blanche s'échapper. Ainsi, du côté de Kito de Pavant et de Jean-Pierre Dick la fronde s'organise-t-elle non seulement pour rattraper celui qui les précède mais également pour recoller à la tête. Ces deux là jetteront leurs meilleures armes dans la bagarre pour la faire tourner à leur avantage. A bord de 1876, le mât fait des siennes mais pas au point de forcer Guillermo Altadill à renoncer à sa belle histoire. Discrets sur la nature exacte de leur mésaventure, les Espagnols poursuivent leur route et vont à présent tenter de limiter les dégâts alors qu'ils accusent 80 milles de retard au dernier pointage. Enfin, DCNS, relégué à désormais plus de 200 milles du premier, continue à payer cher son déficit de vitesse et verra sans doute comme une première libération son passage à Gibraltar. D'un monde à l'autre. D'une course à l'autre, l'Istanbul Europa Race est ainsi faite...
Ils ont dit...
Michel Desjoyeaux – Foncia :
« On est penché mais en même temps il faut de temps en temps mettre un pied devant pour ne pas tomber et de temps en temps mettre un pied derrière. Ca tangue pas mal, on a de la mer courte et de face. Ce n'est pas très confortable. Je préfèrerai une bonne bannette avec un bon coussin ou tout simplement un lit avec un oreiller. On est toujours avec une polaire fine sous le ciré pendant la nuit, ça va encore. Il faisait beau pour notre passage à Gibraltar, c'était juste avant la tombée de la nuit, avec une mer plate parce que le fort courant dans le détroit aplatit complètement la mer. On en a profité pour faire coucou à la caméra et à l'appareil photo. C'était assez sympa, on a rasé la petite enclave espagnole côté africain ».
Gildas Morvan – Veolia Environnement :
« On est content. Hier on était 1,5 mille devant Groupe Bel, tout se passait bien mais malheureusement il a réussi à nous tricoter par le sud et passer devant. Ca nous a tellement énervé que toute la nuit on s'est bagarré pour repasser devant et donc on est content d'être passé devant Bel devant Gibraltar ! Il est passé à Gibraltar dans le Sud, on y est passé également après. On croise un peu les routes et c'est un peu chacun son tour. Chaque bord est un peu différent et ce qui est bien c'est qu'on est toujours au contact, après être devant c'est mieux ! C'était mon premier passage à Gibraltar donc c'était assez sympa. On l'a passé à la tombée de la nuit avec de l'éclairage partout et la chance de le passer sur un seul bord avec 15-20 nœuds avec un peu de courant contraire et un peu de trafic, il a donc fallu se dérouter une fois ou deux pour un cargo. Il y a eu un resserrement des positions à Gibraltar avec le courant et là c'est reparti un peu dans l'autre sens, ça s'est desserré, Foncia a pris un peu d'avance. Il va encore se passer des choses, il y a de la route jusqu'à Brest. Il va y avoir des transitions à négocier, des virements à faire. Il y a encore beaucoup de boulot. C'est toujours dur de revenir mais on va voir. Le bateau est bien calé, on a plutôt une bonne vitesse au près. Hier on était bord à bord avec Bel et on avait plutôt un avantage. Le bateau se comporte bien dans la brise au près, on est plutôt très content de la vitesse. A bord tout se passe bien, on arrive à manger et à dormir. On essaie de récupérer de la première nuit qui était très très dure. Il y a une bonne ambiance à bord, tout se passe bien. »
Kito de Pavant – Groupe Bel :
« On a passé une nuit un peu agitée, un peu comme toutes les nuits depuis Istanbul, donc on commence à s'habituer. On n'a pas été très très bon cette nuit, notamment au passage de Gibraltar. On est arrivé pile poil au mauvais moment. Ça n'a pas été une grande réussite pour Groupe Bel. On s'est fait repasser par Veolia qui était devant nous hier et qu'on avait doublé dans la journée. L'objectif du moment est de repassé devant Veolia, c'est un bateau à notre portée même s'il marche bien au près. Mais la route est longue, on a encore pas mal de chemin devant nous. J'ai les yeux sur l'ordinateur avec les fichiers de vent pour voir à quelle sauce on va être mangé le long du Portugal. Ce n'est pas très simple à gérer, parce qu'il y a du vent le long de la côte qui n'est pas très sûr. On va voir comment ça se passe, ça dépend un peu du timing. On réfléchit beaucoup sur la stratégie, la tactique à observer pour remonter. J'espère que la course va s'arrêter à Brest et que les organisateurs ne vont pas avoir la bonne idée de nous envoyer tirer des bords pour aller jusqu'au Fastnet. Je ne pense pas que beaucoup de coureurs aient envie de passer trois jours de plus à tirer des bords ! »
Jean-Pierre Dick – Paprec Virbac 2
« Le passage de Gibraltar s'est fait sereinement, sur un seul bord, ce qui n'est pas fréquent. Toujours au près, on remonte maintenant le long des côtes espagnoles. Le passage du Cap Saint-Vincent dans la journée va être très compliqué. Sinon notre pot de chocolat a explosé dans le bateau cette nuit. Il y avait une odeur particulière de pain. Alex Pella s'y est gentiment collé pour nettoyer à l'éponge. Je suis passé pas mal de fois à Gibraltar ces dernières années, entre le fait d'être allé à Nice montrer le bateau, avec la Barcelona World Race on est passé deux fois. J'ai passé le détroit une petite dizaine de fois dans ma vie. Cette fois c'était un passage très agréable, la première fois sur un seul bord même si on a failli virer à Trafalgar. Les quarts se déroulent normalement. Je suis à la table à carte entrain de regarder les différentes options météo. Ca discute pas mal, en espagnol, en anglais. C'est assez cosmopolite mais on s'y habitue ma foi. Les décisions stratégiques se prennent essentiellement en anglais. On est content d'être revenu au contact. Même si on n'est pas devant l'espoir est là. A nous de faire les bons bords ! »
Il y a 951 jours
Mer 16 Sept : Dur labeur en Alboran
C'est parti pour du près ! La flotte de l'Istanbul Europa Race, en passe de faire son entrée en Atlantique, a rejoint la mer d'Alboran entre l'Espagne et le Maroc où souffle un bon flux d'ouest de 20-25 nœuds. Cette 3ème et décisive étape entre Barcelone et Brest se poursuit donc de plus belle sur le mode d'un long louvoyage, aussi inconfortable que tactique, jusqu'au détroit de Gibraltar, où les premiers sont attendus en fin de journée. Au jeu des chaises musicales dans le classement, Foncia et Michel Desjoyeaux, qui ont creusé des écarts dans la nuit noire, occupent de nouveau le fauteuil de leader, 8,5 milles devant Veolia Environnement (Roland Jourdain). Ce matin, ils affichent également 11,5 milles d'avance sur Groupe Bel (Kito de Pavant)…
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